Communiqué sur la visite de la CDP à la Sonatel
Dans un communiqué en date du 11 Octobre 2016, publié sur son site web (http://www.sonatel.sn/visite-de-la-commission-de-protection-des-donnees-personnelles-cdp-a-sonatel/), Orange nous annonce qu’elle a reçu la visite, le jeudi 16 septembre, d’une délégation de la CDP menée par sa présidente: «La présidente de la CDP a fait part de son inquiétude face au manque de notoriété de cette institution auprès du grand public, des entreprises et a annoncé le lancement, à venir, d’une campagne de communication bâtie autour de sketchs, films promotionnels, séminaires en Wolof, forums pour l’administration public. Pour mener à bien cette opération de grande envergure, la présidente dit compter sur le soutien financier et matériel de Sonatel.» Au moment où on n’a pas encore fini de déplorer que les pouvoirs publics considèrent le secteur des TIC comme un lieu de recasement d’une clientèle politique qui n’a aucune compétence en TIC, voilà que la Présidente de la CDP aligne bourde sur bourde. En effet, non satisfaite d’avoir avoué publiquement qu’elle ignorait ce qu’était la CDP à sa nomination, discréditant ainsi la décision du Président Macky Sall, la Présidente de la CDP s’est permise d’aller quémander de l’argent à la Sonatel. Comment une autorité administrative indépendante peut-elle demander de l’argent et des moyens matériels à une société privée dont elle doit contrôler les activités? Pour rappel, La Sonatel a déjà reçu de la CDP en 2014 une mise en demeure pour manquement aux dispositions de la législation sur les données à caractère personnel mais aussi en 2015 une interdiction pour les mêmes raisons. Aussi, au-delà de l’impact négatif sur l’image de l’institution, cette requête de la CDP ne constitue-t-elle ni plus ni moins qu’un permis délivré à la Sonatel pour continuer à violer la loi et faire des abus sur les utilisateurs sénégalais des TIC? La Commission de Protection des Données Personnelles (CDP) jouit de l’autonomie de gestion (article 14 de la Loi 2008-12 portant sur les données à caractère personnel) et elle reçoit une dotation budgétaire de l’Etat pour l’accomplissement de ses missions (article 15 alinéa 1er de ladite Loi). D’ailleurs, le législateur a bien précisé au niveau de cet article 15 que la Commission «ne peut recevoir de don ou subvention d’un individu, d’un organisme ou d’un Etat étranger que par l’intermédiaire d’une structure de coopération de l’Etat du Sénégal». A la lumière de ces considérations, ASUTIC estime que cette démarche malheureuse, irresponsable et dommageable, aux antipodes d’un management vertueux dilue l’autorité de cette structure publique. Désormais avec cette Présidente, la CDP est dans l’ère de la gestion nébuleuse caractérisée par des improvisations et des approximations mais surtout par une opacité dans la gestion financière. Cette structure publique, technique et juridique chargée de la protection de la vie privée des citoyens sénégalais méritait vraiment mieux si tant soit peu que les pouvoirs publics sont dans une démarche de travailler pour le Sénégal. Les ambitions déclarées dans les discours de circonstance pour le développement de l’économie numérique sont incompatibles avec les nominations politiques et elles indiquent plutôt le peu d’intérêt que les pouvoirs publics accordent au secteur des TIC. La condition sine qua non pour l’émergence est l’obligation de nommer aux postes de responsabilité des hommes et femmes ayant les compétences requises. L’enjeu du développement du secteur des TIC est aussi à ce prix. Ce blanc-seing donné à la Sonatel par la Présidente de la CDP s’inscrit d’ailleurs dans un cadre général caractérisé par un silence coupable des autorités de régulation. En effet, Après plusieurs sommations annoncés depuis le mois de juillet 2016, la SONATEL a suspendu depuis le Lundi 17 octobre 2016 les numéros de téléphones mobiles non identifiés, ce après plusieurs menaces par SMS sommant les abonnés à s’identifier alors que l’ARTP a fixé la date limite au 10 novembre 2016. Non seulement Orange fait fi du mécontentement qu’il cause à des milliers d’abonnés, de la non fidélisation de sa clientèle et la non protection de sa réputation mais elle ne respecte pas les décisions de l’autorité. Elle est coutumière des violations de la loi et des manquements à cause de la complaisance des autorités. Sur quelles lois, quels décrets ou règlements s’est fondé Sonatel/Orange pour poser un tel acte ? Dans un marché où le consommateur est au cœur de la régulation, Orange n’oserait jamais poser un tel acte. La conséquence aurait été immédiate: perte de milliers de clients et une pluie d’actions en justice. Orange s’est permis de suspendre les numéros de téléphone mobile non encore identifiés car elle sait qu’elle ne risque rien. Dans la pratique, de tous ses moyens d’actions, le consommateur sénégalais n’utilise qu’un seul : le recours au service client de l’opérateur, au lieu d’initier une action en justice, un boycott des produits et services ou agir en faisant jouer la concurrence par un changement d’opérateur via le service de portabilité. Face au désarroi de milliers de consommateurs qui sont dans l’impossibilité d’émettre ou de recevoir des appels, l’ARTP qui devrait être au service des consommateurs n’a entrepris aucune action pour recadrer l’opérateur et rétablir ces derniers dans leurs droits. Cette situation est d’autant plus incompréhensible qu’il n’existe pas au Sénégal de médiateur dans le secteur des TIC, dont l'objectif est de régler à l'amiable les conflits liés au secteur des TIC, alternative à une action judiciaire. L’avantage de cette procédure : elle est gratuite, confidentielle et surtout plus conforme à la culture sénégalaise. Elle permet aussi d’éviter une procédure judiciaire souvent longue et coûteuse. L’ASUTIC souhaite la création de médiateurs indépendants plutôt que des médiateurs internes rémunérés par les opérateurs. Les opérateurs prennent des libertés avec les consommateurs qui sont d'autant plus inacceptables que ceux-ci n'ont pas de moyen réel de se défendre par des actions de groupe en justice. À ce jour, il n'existe au Sénégal aucune procédure permettant d'indemniser en un seul procès les victimes d'un même dommage: un vide juridique synonyme de déni de justice. Ainsi les consommateurs individuellement, ne trouvent aucun intérêt à faire valoir leurs micro-préjudices, du fait de la lourdeur et du coût de la procédure contre un opérateur de téléphonie mobile. Par conséquent, l'action de groupe est d'une impérieuse nécessité au Sénégal, non seulement pour réparer les préjudices de masse dont sont victimes les consommateurs, mais aussi pour redonner au droit son pouvoir de régulation du marché. C'est pourquoi face à un marché oligopolistique, voire cartellaire des opérateurs, un régulateur aphone, l'ASUTIC saluera toute initiative gouvernementale ou parlementaire en vue d'insérer l'action de groupe dans notre droit positif. En attendant que les pouvoirs publics ou l’assemblée nationale s’approprient ces propositions, l’Association Sénégalaise des Utilisateurs des TIC (ASUTIC) invite les consommateurs victimes des opérateurs à exercer leur pouvoir de régulation du marché par la mobilité et le boycott. Il appartient désormais à l’utilisateur d’organiser sa propre défense en étant un consommateur averti et prompt à sanctionner les opérateurs. L’Association Sénégalaise des Utilisateurs des TIC (ASUTIC):
Fait à Dakar, le 30 Octobre 2016 A PROPOS DE ASUTIC |
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